Le 20 février 2020, un tueur xénophobe a assassiné 9 personnes et blessé plusieurs dizaines d’autres à Hanau. Il a frappé deux bars à chicha avant de se donner la mort. À Halle, un potentiel terroriste a été arrêté. Il prévoyait de frapper des synagogues. En juin 2019, le préfet conservateur de la CDU est abattu d’une balle dans la tête. Le principal inculpé est un proche du NPD (Nationaldemokratische Partei Deutschlands), parti néo-nazi Allemand. Dans le même laps de temps, un éphémère accord FDP (libéraux) – CDU (conservateurs) – AfD (extrême-droite) s’est produit. Cet accord en Thuringe – conçu pour chasser die Linke, le part de gauche réformiste -a été rapidement dénoncé comme la poignée de main de la honte. Mais cela forme un précédent: il est désormais envisageable que des accords existent.1
Ces situations révèlent à la fois la percée parlementaire et extra-parlementaire de l’extrême-droite. Elle va de pair avec une légitimation de son discours. Cette maladie n’est pas spécifique à l’Allemagne, mais il est inquiétant qu’elle s’exprime aussi dans ce pays. Cela tant du fait du passé que du poids immense que représente cet État dans l’Union Européenne.
L’ensemble des États connaît cette situation : elle est le reflet d’une tendance lourde. Une tendance nourrie par la dégradation de la situation économique, par la rapacité des bourgeois et des bourgeoises. Cette dégradation se traduit invariablement politiquement. Une destruction progressive des droits démocratiques, des tensions explosives chez les exploités et exploitées… en somme, la pression monte. La lutte constante contre les idées révolutionnaires progressistes font que les expressions politiques de cette colère peuvent se tourner vers la réaction la plus violente. La bourgeoisie s’en réjouit.
Le climat raciste et toxique s’est orné d’une façade démocratique et légale en se cantonnant officiellement à la critique de l’Islam et de ses tendances réactionnaires. Mais dès que ceux qui le défendent s’emportent, ce qui ressurgit immédiatement est la racine raciste et xénophobe. C’est son fondement premier, sa nature première.
Souvent, ces assassins sont présentés comme opérant seul, comme des loups solitaires. C’est partiellement vrai. Le plus souvent ce sont des tueurs isolés comme Brievik, ou des petits groupes. Mais derrière cela, il existe un soutien logistique, un travail mental porté par une communauté, et une responsabilité qui va bien au-delà des groupes fascistes. Cette responsabilité partagée est sur plusieurs niveaux.
- Une complicité morale de la part d’agitateurs et d’agitatrices réactionnaires. Ces individus cherchent à attiser et à provoquer une « guerre des races ». Ils agissent ainsi soit par opportunisme électoraliste, soit par réelle conviction.
- Une complicité pratique, de la part de l’appareil d’État. Les réseaux néo-nazis ou fascistes bénéficient de la tolérance de la part de la police, des services de renseignement ou de la justice. Le scandale de la NSU en 2011 a révélé une imbrication profonde entre les assassins nazis, les services secrets allemands et turcs, et l’État allemand.
- Un silence médiatique, dans lequel des formules éludant le caractère politique du crime sont employées.
- Un appui stratégique : la grande bourgeoisie réactionnaire voit dans l’existence de ces groupes et l’influence de leur idéologie une contre-assurance en cas de défaillance des interfaces démocratiques. Cette « guerre des races » est une excellente manière de prévenir toute velléité d’union entre les classes populaires.
Nous condamnons ces attentats, nous condamnons également les complices directs et indirects de ceux-ci. Nous pensons qu’il faut également dénoncer le contenu du discours fasciste et chauvin : il s’agit d’une entourloupe.
Dans les pays impérialistes que sont la France ou l’Allemagne, une grande partie de ceux qui tombent dans son piège sont des personnes qui se sentent isolées, vulnérables, démunies face aux tensions toujours plus grandes dans la société. Ils se rattachent donc à des courants politiques qui leur promettent l’abolition de la lutte des classes, l’unité nationale, la défense de la grandeur de leur civilisation.
En réalité, ceux qui promeuvent ces discours mentent. Ils ne sont même pas des nationalistes, ils ne défendent pas la nation au sens populaire du terme. Au contraire, ils fragmentent en éclats ennemis ceux qui la composent : travailleurs et travailleuses, masses populaires présentes dans le pays, qui le font vivre et produisent les richesses. Ils ne font que la livrer, ligotée, bâillonnée, à leurs premiers bourreaux : la bourgeoisie impérialiste.
Les seuls qui défendent réellement, fondamentalement les intérêts du peuple, les intérêts des exploités et exploitées, des opprimés et opprimées, ce sont ceux qui luttent contre la bourgeoisie. Ceux qui luttent pour l’unité populaire contre l’oppression et l’exploitation. Ceux qui luttent contre les maux que sont le racisme, le sexisme, les discriminations. Car ces maux sont des fêlures dans l’alliance de tous ceux qui sont victimes du système d’asservissement qu’est le capitalisme-impérialisme.
Nos pensées vont vers les victimes de ces attentats odieux. Ces attentats sont d’autant plus odieux que les proches des victimes et les survivants et survivants obtiennent rarement justice.
Lorsque les fascistes et xénophobes n’hésitent pas à dire que la responsabilité première provient de l’immigration ; lorsque les médias imposent un silence complice ; lorsque la justice prononce des peines ridicules, les victimes sont assassinées à nouveau.
Donnons-leur de la voix. Dénonçons le fascisme et la complicité de la bourgeoisie et de son État !
1En France, en 1998, une situation similaire s’est produite : Charles Millon, député UDF (centre) a été élu de manière contestée avec les voix de l’extrême-droite. La situation a déclenché un tollé a l’époque. Aujourd’hui, elle ne poserait plus de problème.