Le séisme catalan.

Le séisme catalan.

Hier, le 1er octobre 2017, la Catalogne a voté par référendum. Hier, les urnes ont parlé en faveur de l’indépendance. Hier, une faille s’est ouverte dans l’oppression nationale que subissent les peuples de l’Etat espagnol, depuis la mise en œuvre de la dictature franquiste.

Hier, le gouvernement du Parti Populaire, les héritiers de Franco, a montré une fois de plus son visage de bourreau et de criminel, blessant près d’un millier de personnes par ses forces armées. Il faut dire que ce parti, tout comme le PSOE de « gauche », sont des pourfendeurs des volontés indépendantistes. Quand ce ne sont pas les Catalans qui sont matraqués, ce sont les Basques qui subissent mandats d’arrêts, torture, et meurtres extrajudiciaires.

Aujourd’hui, ces chauvins sentent le sol se dérober sous leurs pieds.

Quelques chiffres : 42.3% de participation. Un taux loin d’être ridicule, qui s’approche presque de la participation aux législatives dans l’Etat français. 2.26 millions de personnes ont voté, dont 2.02 millions pour le oui à l’indépendance.

Les partis opposés à l’indépendance ont appelle au boycott du référendum. Au delà de la manœuvre visant à tenter de diminuer sa valeur, il s’agit d’un aveu de faiblesse. Une lame de fond indépendantiste traverse la Catalogne, une lame de fond que nul ne peut nier.

D’une manière prévisible, les porte-paroles officiels des autres états ont exprimé leur solidarité avec le gouvernement de l’Etat espagnol, tout en essayant de maintenir une parodie de démocratisme et de rejet de la violence policière.

Emmanuel Macron s’est exprimé, quant à lui, en déclarant qu’il n’avait pas à juger de l’attitude du premier ministre de l’Etat espagnol. Une belle manière de dire qu’il ne s’oppose pas a ce que le sang coule. Une belle manière de s’inscrire dans une tradition très française du « botter en touche » pendant que la répression frappe. Manière aussi d’éviter que les yeux se tournent vers un Etat français où l’état d’urgence rentre peu à peu dans le droit commun et où la police nasse et écrase les manifestations.

Nul doute que dans 10 ans, dans 20 ans, les mêmes clameront leur soutien à sans faille à la liberté et leur loyauté vis-à-vis des aspirations populaires. Les partis bourgeois, la bourgeoisie en général, ne se gêne nullement pour mentir et falsifier la réalité. L’essentiel est, pour elle, maintenir son pouvoir et de se prétendre du côté du peuple.

Cette attitude ne peut qu’évoquer 2011, où Michèle Alliot-Marie, alors ministre des affaires étrangères, proposa à Ben Ali, en Tunisie, l’aide des CRS français pour écraser le printemps arabe. A ce moment là, cette attitude de solidarité entre les ennemis des masses était générale. Aujourd’hui, tous et toutes font mine d’avoir soutenu, en secret, les volontés de liberté.

Quoiqu’il en soit, quelque soit, aujourd’hui, l’Etat espagnol est à la croisée de chemins.

Sa répression a creusé un fossé sanglant entre le pouvoir de Madrid et les masses catalanes. Elle a démasqué sa direction, aux yeux du monde comme étant un ordre arbitraire, anti-démocratique, se retranchant derrière des lois scélérates et antipopulaires. Cette répression, dans un sens clausewitzien, entraîne une montée aux extrêmes. Elle ne fait que renforcer le sentiment d’arbitraire et le désir d’émancipation, tant des masses catalanes que des autres composantes de l’Etat espagnol.

Les indépendantistes sont politiquement les gagnants. Ils sont les gagnants du référendum, les gagnants en termes d’image, les gagnants en termes de gains moraux. Les seules voies qui reste à Madrid sont celles, d’une part de l’aveu d’échec, de prendre le chemin du démantèlement d’un Etat espagnol juridiquement construit sur le franquisme. L’autre est celle du sang. Celle d’une nouvelle guerre civile, celle de l’écrasement de la Catalogne.

Car se séisme ne se limite pas à la simple question de la perte de la Catalogne -et de 20% de son PIB- pour l’Etat espagnol. Elle est plus vaste. Elle est plus profonde. Elle met fin au paradigme des frontières de l’Europe occidentale, immuables et intangibles.  Aujourd’hui, la Catalogne est un point d’ancrage. Elle créé un précédent. Un précédent qui peut conduire d’autres nations opprimées à lever leur drapeau et a  réclamer, elles aussi, leur droit à l’autodétermination. Nous songeons à toutes ces colonies que les défenseur de l’impérialisme français nomment « ses joyaux. » Nous songeons à toutes ses possessions issues de l’époque coloniale. Nous songeons aux nations oubliées et muselées au sein de l’hexagone. Nous saluons, par ailleurs, l’initiative de Breizhistance d’avoir organisé un meeting commun, en solidarité.

Un large consensus entoure, dans les milieux de gauche radicale, la question du vote catalan. Il est clair que lorsque les frontières de l’Etat français seront concernées, les visages souriants vont se décomposer. Les alliés de la veille se trouveront mille excuses pour refuser que la Réunion, la Guyane, la Polynésie et, encore pire, d’autres comme la Bretagne, entre autres, puissent poser la même question que les Catalans.

Nombre de sophismes sont assénés pour justifier cela, et faire du droit des peuples un mot creux et vide de sens. Peur de faire tomber des zones dans l’escarcelle de l’impérialisme américain, peur de l’impossibilité pour ces régions de se gouverner elles-mêmes, rejet absolu de tout « nationalisme ». Tout ces arguments ne font que marquer la peur du démantèlement des Etats impérialistes, d’une tendance à préférer son propre impérialisme à celui des autres, d’un déni de celui-ci.

L’Unité Communiste de Lyon ne présente pas le référendum de Catalogne comme une révolution démocratique, encore moins comme une révolution prolétarienne. Tout ce qui bouge n’est pas rouge. Mais cela n’ôte en rien le fait que sortir des entraves du parasitisme de la bourgeoisie madrilène, le vaste mouvement populaire, l’immense espoir que représente ce vote et la mobilisation qu’il suscite sont des aspects positifs.

La bourgeoisie catalane s’attend à ce que la Catalogne lui revienne de droit. Mais elle pourrait bien déchanter, car les organisations populaires et anticapitalistes de Catalogne se sont, plus que toutes les autres, renforcées dans l’affrontement avec le pouvoir madrilène.

Les organisations populaires et révolutionnaires de Catalogne sont la véritable porte de sortie de la domination et de l’expression libre de la nation catalane. Aujourd’hui Madrid est l’ennemi, lointain et dans sa forteresse. Demain, ce sera probablement la bourgeoisie barcelonaise. Mais elle ne trouvera pas une masse apathique en face d’elle. Elle trouvera des masses populaires qui ont, dance cette lutte, fait l’expérience de la victoire, l’expérience de la libération et de la mise en place d’un autre pouvoir. Espérons que cette étape mène vers d’autres victoires, plus grandes et prolétariennes !

Aujourd’hui, nos regards sont vers la Catalogne et vers son combat !

Visca Catalunya ! Som un sol front ! Catalunya al cor !

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