Hommage aux victimes de Tchernobyl et aux liquidateurs.

Cette année, nous commémorons les 30 ans de la catastrophe de Tchernobyl.

 

Le 26 Avril 1986, la centre Vladimir Ilitch Lénine, située à Tchernobyl, à proximité de la ville de Pripiat, explosait. Cet accident nucléaire, le plus grave jamais produit, a conduit à la fermeture d’une zone d’exclusion de 2 600 km², à l’évacuation de plus de 200 000 personnes, ainsi qu’à l’irradiation d’une grande partie de la population locale.

 

La lutte contre l’incendie de la centrale, les opérations de sécurisation du site, ainsi que la décontamination de la zone ont exposé environ 600 000 travailleurs et soldats à des taux de radiation atteignant parfois 2 à 3 000 Röntgen par heures, quand on sait que la dl50 -dose à partir de laquelle 50% des individus exposés décèdent- est de 400 rem/an.

 

(La ville de Pripiat aujourd’hui)

 

Ces combattants de l’atome, nommés liquidateurs, ont accompli leur tâche au mépris du danger, conscient du risque terrible pour l’Europe, voire le Monde, si jamais le danger dans la centrale de Tchernobyl n’était pas complètement éliminé.

 

Dans les opérations menées par les premiers arrivés, les pompiers de la région, qui ont payé un lourd tribut en s’exposant directement aux radiations

 

(Le toit effondré du réacteur quelques semaines après l’accident)

 

Dans des opérations de largage de sable et de bore dans le brasier du réacteur n°4 encore en feu, puis par des largages de près de 2 000 tonnes de plomb pour sceller le réacteur, les pilotes et les soldats ont été exposés à des doses massives de radiations, dont beaucoup sont morts ou restés infirmes.

 

Dans les opérations d’approche au sol, près de la centrale, pour évaluer la situation, dans le creusement par des mineurs du Donbass ou de la région de Toula d’une salle sous la centrale pour installer un dispositif de refroidissement -lequel devait empêcher le corium, le cœur fondu, de traverser la couche de béton et d’atteindre la nappe phréatique, causant un risque de contamination massive et pouvant potentiellement déclencher une explosion allant jusqu’à 7 mégatonnes- mais également dans une tâche beaucoup plus dure et coûteuse humainement, celle de nettoyer le toit des décombres.

 

(Les liquidateurs en action sur le toit. Les rayons qui partent du sol sont le fruit de l’exposition de la pellicule à la radiation)

 

Pour poser le sarcophage de béton armé au dessus de la centrale, il était impératif de retirer du toit les morceaux d’uranium et de graphite projetés par l’explosion du cœur du réacteur. Or, l’opération avait logiquement été tentée avec des robots, qui tombèrent en panne les uns après les autres à cause de l’exposition aux radiations. Pour résoudre cette terrible équation des “robots biologiques”, ou plus poétiquement les “Krycnye Loty”, les chats du toit, furent envoyés.

 

 (Les liquidateurs arrivent sur le site.)

Recouverts d’un costume de plomb, censé les protéger, ces soldats furent envoyés, pour des durées d’opération minimes -quelques dizaines de seconde, une minute au plus- jeter le graphite dans le trou béant causé par l’explosion.

 

Cette exposition courte ne fût pas sans séquelles. Il est estimé par l’ONU que, si seulement 47 morts sont directement liées à l’exposition aux radiations, 2 200 seraient décédés des suites directes, et 25 000 avaient perdu la vie en 2004.

 

(une des médaille délivrées aux liquidateurs; une goutte de sang traversée par les rayons alpha, bêta et gamma.)

 

Ces combattants furent commémorés comme des héros les années suivantes, et reçurent des pensions de la part de l’Etat. Cependant, avec la chute de l’URSS1, les pensions et les honneurs se sont taris, et il ne resta bientôt plus qu’une misère noire pour ces combattants de l’atome.

 

Nous leur rendons hommage aujourd’hui, à ceux qui ont donné leur vie pour que la catastrophe de Tchernobyl ne soit pas devenu celle de l’Europe entière. Nous rendons hommage à cette abnégation dont ils ont fait preuve.

 

Nous ne sommes pas de grands amoureux de l’URSS révisionniste, qui avait, lors du XX ème congrès du Parti Communiste d’Union Soviétique, abandonné les fondamentaux du marxisme et du communisme, l’esprit de la révolution, la volonté de combattre l’impérialisme et le capitalisme, et qui au contraire s’est enfoncée dans une liquidation de son héritage socialiste, dans la création -sous le prétexte de la division internationale socialiste du travail- d’un social-impérialisme, en somme, une URSS qui n’était plus le bastion de la révolution.

 

C’est dans ce contexte de pourrissement économique que s’est produite cette catastrophe. Monétarisant l’économie socialiste, édifiée avec patience depuis la révolution, les révisionnistes avaient creusé leur propre tombe. Les investissements dans l’industrie se tarirent, l’économie s’asphyxia, et elle se fragilisa.

 

Face à une concurrence exacerbée, choisie, avec l’Amérique, l’URSS était lancée dans une lutte économique dans laquelle elle partait désavantagée. Cela s’est aggravé d’années en années. Cela eut également des répercutions sur la population, sur les chercheurs, dont le directeur de la centrale Viktor Petrovitch Brioukhanov, qui, au mépris des règles de sécurité, lança un programme expérimental, pour dépasser le plan prévu, et être bien vu de ses supérieurs.

 

Cependant, cela ne nous empêche pas de rendre hommage à ceux qui, voulant symboliser leur victoire, ont accroché au sommet de la cheminée de la centrale le drapeau rouge, dans un hommage à la prise du Reichstag.

 

Cependant, force est de constaté qu’après 30 ans, et 5 ans après la catastrophe de Fukushima, le nucléaire, le secret d’Etat, la question de l’énergie, restent encore des sujets brûlants.

Image illustrative de l'article Centrale nucléaire de Tchernobyl

(Le réacteur N°4 aujourd’hui)

 

Le prétexte Tchernobyl: un enjeu de la guerre froide.

 

Lors de la catastrophe de Tchernobyl, un déluge de condamnations ont été déversées sur l’URSS -guerre froide oblige- mettant en avant la lenteur d’action des secours, les mensonges ou la rétention d’information sur l’accident, la manière dont ont été géré les travaux, avec leur coût humain faramineux…etc.

 

La vérité nous oblige à plaider à décharge sur certain de ces arguments, et à en opposer d’autre. Avant Tchernobyl, il n’y avait pas eu de Tchernobyl. Jamais un accident comparable n’avait eu lieu, et la gestion de crise face à un incident de cette ampleur avait un caractère tout à fait expérimental. Insuffisant, certainement, mais expérimental.

La lenteur de réaction à été le fait, en partie, de la difficulté énorme d’évaluation du danger et d’évaluation des dégâts. Les moyens techniques n’ont permit de se faire une idée réelle de la situation qu’au bout de plusieurs jours, date à laquelle la ville de Pripiat à, par ailleurs, été évacuée intégralement.

Le fait que les délégations de chercheurs, spécialistes du nucléaire, aient logé par ailleurs dans la ville même, dormant, mangeant, travaillant sur place, indique une sous-évaluation grave plus qu’un mépris généralisé.

Le maintient des manifestations du premier mai à Kiev est dans la droite ligne de cette sous-estimation. Le secrétaire générale de la RSS d’Ukraine s’est par ailleurs suicidé peu après, rongé par le remord.

L’envoi de nombreux soldats, de nombreux travailleurs, répondait à une logique d’urgence, à une nécessité impérieuse de liquider le problème le plus vite possible. Le coût en à été énorme, mais il partait d’un calcul froid: Coût connu si une action est entreprise / coût estimé si le pire scénario se produit.

 

 

A titre de comparaison, l’accident nucléaire de Fukushima est révélateur.

 

 (La centrale de Fukushima)

 

La société TEPCO à délibérément falsifié des rapports indiquant un danger pour la centrale Fukushima Daï-chi en cas de tsunami, mettant, pour éviter des travaux sur la central, délibérément en danger la population. Dans le cas de Tchernobyl, c’est une expérimentation sur le système de sécurité qui à pris une tournure catastrophique.

 

La même société à fait obstruction face à l’Etat japonais dans sa transmission d’information sur la situation, minimisant à chaque fois la gravité de la situation. Elle a été épinglée à plusieurs reprises pour ses manquements aux règles de la sûreté ainsi que pour des dissimulations d’accidents survenus dans ses centrales.2

 

Quant à la situation à l’heure actuelle sur la centrale de Fukushima, la confusion règne. Employant une technique de pointe, la photographie par muons3, les chercheurs sont parvenus à obtenir une image de l’enceinte du réacteur. Résultat des courses: Vide. Le cœur n°1 (un des deux cœurs rentré en fusion complète), transformé en corium par sa fusion, se serait donc écoulé dans les étages du dessous.

 

(Photgraphie prise par un appareil à détection des muons, les enceintes de confinement apparaissent distinctement…et vides) 

 

Où est-il ? Mystère. Mais le risque d’une atteinte de la nappe phréatique est réel. Or, elle subit déjà une contamination par des rejets d’environ 300 t d’eau radioactive par jour, à travers les fissures de sons soubassement.

 

La facteur humain, le capital humain, qu’en est il de son usage ?

 

Pour la situation de Tchernobyl, l’urgence et l’improvisation ont régné en maître cruel sur les opérations, prélevant un lourd tribut. Dans le cas de Fukushima Daï-Chi, la situation se mêle aux relents immondes des profits qui peuvent se faire sur l’exploitation crasse des travailleurs.

 

Une partie importante des travailleurs dans les zones contaminés, chargés de ratisser le sol, d’éliminer les traces de radiations, est en situation de surexploitation: Payés de l’ordre de 10$/h, sans indemnités de logement, sans indemnités de repas, certains s’endettent dans ce travail ingrat. D’autres choisissent de se débarrasser de leurs dosimètres pour continuer à travailler dans la zone après avoir atteint le maximum toléré en terme d’exposition.

 

Comme des primes sont versées pour les zones les plus dangereuses, les yakusas n’hésitent pas à faire du recrutement forcé de chômeurs et de S.D.F., envoyés travailler en zone contaminé pour que la mafia s’engraisse.

 

Ce ne sont que certains aspects, mais le traitement de l’information, sa transmission aux populations, ainsi que les égards pour la main d’œuvre n’ont non seulement pas changé, ils ont même empiré pour certain. L’incompétence s’étant mêlé aux questions de rentabilité et de secret cher à cet secteur.

 

Pour finir sur Fukushima, il est estimé que les travaux de décontamination et de démontage s’étaleront sur 20 ou 30 années. Dans les faits, jamais une centrale nucléaire n’a été démontée.

 

La France, prochaine sur la liste ?

 

(La centrale nucléaire de Fessenheim)

 

La fatalité frappera certainement. Les réacteurs nucléaires français font du rab’ de vie. Ils tournent depuis bien plus longtemps que la date originelle de leur fermeture. Or, ils tourneront probablement jusqu’à leur casse, tant le démontage est une question problématique.

 

A l’heure actuelle, c’est un véritable casse-tête que cette question de la durée de vie. Construits en grande pompe à l’époque où la France voulait mener cavalier -relativement- seul, indépendant dans le bloc Ouest, cette nucléarisation massive s’est faite sans jamais se poser la question du démontage.

 

Depuis, la durée de vie des réacteurs est allongée artificiellement, par décret.4

Hormis le démontage, une question de profit se pose également. EDF, bien que théoriquement entreprise publique, est un monopole jaloux, frileux comme le sont tous les monopoles. Des travaux , un arrêt de centrale signifierais des pertes en terme de rentabilité.

 

D’autant que derrière EDF se trouve aussi l’ombre du fleuron mondial du nucléaire: AREVA.

 

AREVA, un dossier inépuisable, une entreprise qui forme, dans certains pays, un Etat dans l’Etat, arrosant chaque parti politique, chaque faction, chaque clan, pour pouvoir continuer éhontément à exploiter à bas coût les sous sols de l’Afrique.

 

Car, au final, la question n’est pas tant celle du nucléaire en tant que tel que de la gestion de ce secteur si central, si stratégique, qu’est l’énergie. La question du nucléaire de manière spécifique n’a pas réellement de sens. Chaque type de production d’énergie à ses aspect néfastes et ses aspects positifs. Le charbon et le pétrole sont tout aussi meurtriers5, les ressources renouvelables comme le solaire présentent eux aussi des inconvénients graves6, en somme il n’existe pas de quadrature de cercle sous le capitalisme pour la production d’énergie.

 

Un secteur public de l’énergie serait-il une garantie ?

 

Non, hélas. La notion de secteur public en monde capitaliste est une notion bien trompeuse. EDF, Cogema (ancêtre de AREVA) étaient des monopoles publics, comme Elf en son temps. Cela ne les a nullement empêchés de faire de sombres affaires, d’être mouillés dans des scandales, dans des coups d’Etat.

 

La seule garantie que nous ayons n’est pas une question purement de forme, il est une question de contrôle et d’impact décisionnel. Or, sans un Etat du peuple, dirigé par le peuple, rien de cela n’est possible. L’Etat bourgeois est là pour protéger la bourgeoisie, dont le but est d’amasser du profit. Rien d’autre.

 

C’est notre Etat que nous devons construire, un Etat socialiste, là pour répondre aux besoins du peuple, dont une énergie sûre et propre.

 

Sans cet Etat, sans ce changement révolutionnaire de société, les Fukushima et les Tchernobyl seront toujours une menace.

 

 

 

1A laquelle la catastrophe de Tchernobyl est liée, étant donné son coût humain et financier terrible (plusieurs milliards de roubles), et son coût politique pour l’équipe de Gorbatchev alors au pouvoir.

2Source: http://www.liberation.fr/planete/2016/02/26/fukushima-tepco-dans-le-viseur-de-la-justice_1436001

3On utilise le rayonnement de fond de l’univers, lequel est dévié par les objets denses, dont l’Uranium. (19g/cm3)

4http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2016/02/23/20002-20160223ARTFIG00319-la-prolongation-des-centrales-nucleaires-en-question.php

5Selon Science & Vie 1 000 000 de personnes chaque année meurent à cause de la pollution atmosphérique.

 

6L’utilisation de terres rares notamment, lesquelles expliquent un certain nombre de conflits armés d’aujourd’hui.

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