Mettre dos à dos l’extrême droite française et Daesh ?

CET ARTICLE A ÉTÉ RÉDIGÉ EN NOVEMBRE 2015 A LA SUITE DES ATTENTATS DE PARIS ET NE PREND DONC PAS EN COMPTE LES ÉVOLUTIONS DEPUIS CONCERNANT LA SITUATION POLITIQUE ET MILITAIRE. 

 

Mettre dos à dos l’extrême droite française et Daesh ?

 

L’extrême-droite est coutumière des grands écarts et des sauts périlleux de la pensée. Cela n’est pas une nouveauté. Cependant, quand elle n’est pas en train de vendre les armes qui ont servi à la tuerie de Charlie Hebdo, elle trouve quand même le moyen de faire le jeu des forces réactionnaires qui opèrent au Moyen-Orient.

Soyons d’une claire et cruelle honnêteté : Les forces politiques qui la composent sont les seuls qui ont à se réjouir des attentats, qu’ils voient comme une démonstration par le fait de la véracité de leur thèses sur le caractère intrinsèquement terroriste de l’Islam. Démonstration d’un fausseté nette, mais qui pour autant est en vogue et est portée par un véritable raz-de-marée idéologique.

 

« Refugees not welcome » : comment cette phrase renforce Daesh

 

 

« Refugees not welcome » scande t’elle sur tous les toits, ceci de manière tout aussi figurative que littérale. L’extrême-droite tente d’agir comme un lobby en faveur de la fermeture des frontières, cela n’est pas nouveau.

Les arguments employés ne servent qu’une politique démagogique, et recyclent médiocrement des thèses employées pour chaque vague migratoire. Cependant, ils ont un écho gênant à l’heure actuelle.

Une des choses que redoute Daesh, c’est le vide. C’est même quelque chose qui tend à les terrifier. Cet exode massif de personnes qui quittent le prétendu califat, ou qui fuient la guerre civile, privent en effet Daesh d’une main d’œuvre, d’une source de revenu, bref de force vitales dont l’organisation à cruellement besoin.

Dabiq, le journal de Daesh, le mentionne d’ailleurs de manière quasiment explicite. A travers leurs réseau de presse, ils cherchent à attirer des spécialistes ou des techniciens qualifiés pour permettre à leurs infrastructures de fonctionner de manière efficaces. Et pour cause, ils en manquent cruellement.

La fuite massive de ces personnes qualifiées, qui pouvaient financièrement assumer les copieux pots-de-vin, ou les frais de départ de leur pays, met l’EI dans l’embarras. Une fuite encore plus massive la mettrait rapidement à genoux, incapable de réparer les dégâts des frappes.

 

Gêner de quelque manière que ce soit l’exil des personnes fuyant l’EI, ne pas encourager les défections dans ses rangs, c’est lui offrir un cadeau certain. C’est lui offrir une durée de vie plus longue.

Au lieu de placer de la méfiance dans ceux qui fuient la guerre civile ou le régime de terreur du prétendu califat, la logique voudrait, qu’au contraire, il faille tout faire pour faciliter l’évacuation du secteur, faciliter une espèce d’opération d’évacuation, en transformant les régions contrôlées par Daesh en désert aride.

 

Daesh et l’extrême-droite se réjouissent en commun de chaque fermeture de frontière, de l’accroissement de la méfiance envers ceux qui fuient leur pays. La propagande anti-arabe et antimusulman menée par de nombreux groupes politiques ne peut que faire éclater de joie l’EI.

Daesh ne cherche pas, pour le moment, à imposer un ordre hégémonique sur le monde. Il se contente d’ambitions bien moindre. Donc, contrairement à des mouvements de type insurrectionnel que nous avons pu connaître durant le 20e siècle, ils ne cherchent pas à constituer une cinquième colonne ou à s’implanter politiquement dans les pays occidentaux. Son objectif n’est donc pas de convertir à sa cause des résidents. Il n’y a pas d’ambition de créer des espèces de « no go zones » ou de « zones libérées » à l’image de la théorie de la guerre populaire prolongée de Mao Zedong.

Non, Daesh table sur une théorie simple et accessible à tous : L’occident rejette l’Islam viscéralement et il n’y a aucun espoir pour les musulman dans ces pays. Daesh encourage donc au départ pour la région sous son contrôle.

Cependant on peut voir là où la théorie de Daesh et les thèses de l’extrême-droite se rejoignent : Bien que n’ayant pas toujours été islamophobe, l’extrême-droite à fait que la question musulmane un cheval de bataille particulièrement efficace. Adhérant dans une certaine mesure à l’idée du « choc des civilisations » de Samuel Huntington, l’extrême-droite défend une thèse symétrique de celle de Daesh : Les musulmans ne pourraient avoir leur place dans les pays de civilisation judéo-chrétienne, et seraient donc condamnés à les quitter.

 

Comment les thèses de l’EI et de l’extrême-droite se renforcent mutuellement ?

 

Cette symbiose prend la forme d’une prophétie auto réalisatrice : Daesh théorise que l’occident est l’ennemi par essence de l’Islam, et qu’il doit être détruit. L’extrême droite théorise que l’Islam est l’ennemi par essence de l’occident et qu’il doit être détruit également.

A chaque acte raciste ou islamophobe, l’extrême-droite valide la thèse de Daesh, la renforce, accroit son influence sur des personnes isolées et vulnérables. A chaque action, Daesh cherche à faire la même chose, en cherchant particulièrement à jeter la suspicion sur les réfugiés, renforçant ainsi les positions d’extrême-droite dans les pays occidentaux, et donc permettant un effet d’entrainement qui jette dans les bras de la réaction de plus en plus d’individus.

L’idéologie réactionnaire trouve facilement prise sur des éléments fragilisés. L’individualisation de plus en plus forte qui peut s’opérer, malgré l’illusion donnée par les réseaux sociaux, permet à ces idées de frayer de plus en plus aisément leur chemin. Il n’existe pas de solution miracle bien entendu, mais la socialisation, le fait de tisser des liens et de vivre en communauté protège de ce poison.

Le fait de céder à la panique, aux idées effrayantes véhiculées par l’extrême-droite n’offrirait rien de tout cela. Bien que ce soit indépendant de leur volonté, ces idées entretiennent un feu couvant qui pourtant mérite d’être désamorcé.

Aider les réfugiés, aider ceux qui sortent de cet enfer, faciliter leur possibilité de vivre dans de bonnes conditions est une manière bien plus concrète de lutter contre l’EI que de répandre des rumeurs, des discours destinés à effrayer ou à diviser. 

 

 

Le fait de céder à la panique, aux idées effrayantes véhiculées par l’extrême-droite n’offrirait rien de tout cela. Bien que ce soit indépendant de leur volonté, ces idées entretiennent un feu couvant qui pourtant mérite d’être désamorcé.

Aider les réfugiés, aider ceux qui sortent de cet enfer, faciliter leur possibilité de vivre dans de bonnes conditions est une manière bien plus concrète de lutter contre l’EI que de répandre des rumeurs, des discours destinés à effrayer ou à diviser. 

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