C’est ainsi qu’on marche sur des cadavres.

C’est ainsi qu’on marche sur des cadavres.

                Un crime, un meurtre, un attentat, cela induit en tout premier lieu de proches éplorés, des familles brisées, des amis et des amies en détresse, devant la perte d’êtres chers. Ce sont des moments de drame, des moments abominables, que seuls les cyniques les plus désabusés peuvent souhaiter.

                Dans le cas de la prise d’otage de Trèbes, dans le cas du meurtre de Mireille Knoll, ce sont d’abord vers celles et ceux qui les pleurent que vont nos pensées. Nous leurs transmettons chaleureusement notre salut.

                En revanche, d’autres n’ont pas ce regard. Les vautours sont légion, autour de chaque affaire sordide, qu’ils veulent monter en épingle, autour de chaque crime, autour de chaque acte de violence, autour de tous ces faits qui ne pour eux que des occasions de vomir leur bile. Les morts ne comptent pas à leurs yeux. Seul compte l’instrumentalisation qu’il est possible d’en faire.

                Il est vrai que chaque expression de violence est une illustration des contradictions de notre société, qui les génèrent. Les individus perdus, les exclus, les parias, qui se livrent au petit banditisme, qui sont récupérés par tous les prédicateurs de la haine, sont les enfants d’une société malade. Leur trajectoire chaotique se termine par le fait de faire couler le sang, par une balle tirée ou reçue. Cela n’excuse pas les actes, mais cela les explique.

                Or, les explications, les vautours n’en veulent pas. Expliquer, pour eux, pour elles, c’est demander de comprendre. Demander de comprendre, c’est déjà excuser. Excuser, c’est en faire l’apologie. Ils et elles n’en veulent pas, car il est nettement plus pratique d’en faire des monstres inhumains, portant le mal de manière innée, ou dans leur gènes. Les morts sont des prétextes, les cadavres qui s’entassent servent de piédestaux.

                L’extrême-droite et la droite réactionnaire font leurs affaires sur les morts des attentats. Ce n’est pas une nouveauté. Elles tentent de s’ériger en rempart de protection de la “civilisation” contre la “barbarie”, alors qu’elle partage un véritablement fond politique commun avec celui des terroristes réactionnaires, quand ce ne sont pas des rapports commerciaux. Elles cherchent à en tirer profit, où dans le but d’instiller plus de division, plus de vexations, plus de ségrégation dans la société – ce qui légitime, par effet de miroir, le discours de Daesh. Les déclarations populistes et démagogues d’une Marine le Pen, d’un Laurent Wauquiez, sur la question de l’enfermement des fichés S, sont des attaques contre la présomption d’innocence, une volonté de liquider préventivement les menaces réelles ou supposées… En somme il s’agit d’une mesure fasciste, écrite par le sang des victimes.

                Quelle absence de vergogne que de voir les représentants d’un Etat qui traque les réfugiés, qui emprisonnent ceux et celles qui leur viennent en aide, qui laisse mourir des femmes enceintes dans les Alpes, marcher  en mémoire de quelqu’un qui en a subit elle-même les foudres. Ceux et celles qui organisent la misère, la stigmatisation, l’exclusion sociale, ce qui pousse au crime en somme, viennent se pavaner en espérant que des louanges leur seront adressées.

                Que dire de la présence du Front National, qui plus est protégé par la Ligue de Défense Juive, couverture du Betar, organisation considérée comme terroriste aux USA et en Israël ? Fondé par des anciens SS, sur la base d’une défense de Vichy, connu pour ses dérapages antisémites notoires, la présence du Front National est une humiliation pour la mémoire de Mme Knoll. Quant à celles et ceux qui le leur ont fait remarquer, la police les ont tout simplement braqués de leurs armes. pour les faire reculer. Marine Le Pen avait été déclarée indésirable par le CRIF, Conseil Représentatif des Institutions Juives de France, tout comme Jean-Luc Mélenchon. L’un et l’autre ont par la suite été exfiltrés.

                Que CRIF se permette de blacklister qui bon lui semblait, au nom de sa propre perception politique pose des questions. Nous ne soutenons ni Marine le Pen, ni Jean-Luc Mélenchon -que nous ne plaçons pas sur le même plan, cependant- et nous considérons qu’il y a une part essentielle d’opportunisme à leur présence.

                Tandis que le fils de Mireille Knoll a déclaré que tout le monde serait le bienvenu, le CRIF ne s’est pas posé la question sous cet angle là. Ce conseil, pro-israélien, a décidé de salir la mémoire de Mme Knoll pour imposer son ordre du jour et ses considérations politiques. Dans les faits, les tentatives de créer l’amalgame nauséabond entre l’opposition à la politique de l’Etat Israélien et l’antisémitisme sont des méthodes qui salissent les mémoires et qui contribuent à, ironiquement, légitimer un discours qui entremêle effectivement les deux.

                Alors que lors de la “journée du retour à la terre” plus de 1000 Palestiniens et Palestiniennes ont été tuées par Tsahal, alors que Gaza subit toujours le blocus, alors que des révélations sur les raids secrets de l’aviation Israélienne sur la Syrie viennent d’être révélés, tenter de lier les deux est un acte sordide. Nous sommes solidaires du peuple Palestinien, qui subit l’occupation et les brimades de la part du colonialisme israélien, pourtant cela ne se lien nullement avec l’antisémitisme. Les Israéliens et Israéliennes comptent également parmi les otages de cette politique aventuriste et criminelle menée par le gouvernement de l’Etat hébreux.

                Beaucoup, dans le cas de l’assassinant immonde de Mireille Knoll, ont voulu utiliser celui-ci. Non pour dénoncer l’antisémitisme qui existe dans la société, non pour lutter contre lui, non pour s’attaquer à ses racines, mais uniquement pour l’attiser ou l’utiliser à des fins politiques. L’enquête, pour le moment, ne démontre pas que le crime commis soit, à l’origine, un crime antisémite. Ce qu’elle démontre c’est que des stéréotypes antisémites -la richesse supposée, soupçonnée- sont à la base de celui-ci.

                                L’antisémitisme existe, de pair avec les autres formes de racisme, au sein de la société de l’Etat français. Il est un poison, un fléau, un cancer à éradiquer. Les victimes sont à soutenir, sont à protéger. Mais il n’est pas acceptables que ceux et celles qui meurent de la bêtise, de la haine, de la crapulerie soient utilisés comme enjeu politique, à l’encontre de leur pensées, à l’encontre de leurs désirs. D’autant que le racisme, l’antisémitisme, est attisé par la politique réactionnaire de nombreux Etats, de nombreux agents, lesquels ne sont que trop heureux de pouvoir diviser les classes populaires, dresser les nations les unes contre les autres, scinder l’unité de celles et ceux qui partagent les mêmes intérêts. Trop heureux que la haine divise, sépare. Que la méfiance, la défiance, la peur, isolent. Ainsi, l’exploitation peut continuer dans les conditions les plus favorables pour ces parasites ! Ainsi l’impérialisme, qui est le terreau fertile de la guerre, peut s’étendre, légitimé par l’instrumentalisation de la souffrance des masses populaires de l’Etat français.

                L’Unité Communiste de Lyon s’oppose à toute récupération. Elle considère que toutes celles et tout ceux qui usent de victimes comme promontoire pour leurs discours ne devraient que se taire. La solidarité est ce qui est à offrir, non les larmes de crocodile !

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