La fin du numerus clausus ?

Le gouvernement aurait-il perdu tout sens de classe ?

Dans leur croisade pour libéraliser les différents secteurs, Emmanuel Macron et Édouard Philippe viennent à s’en prendre au numerus clausus qui cadenasse les facultés de médecine depuis des années.

Macron, le 18 septembre, a ainsi déclaré : “On veut sortir de la situation actuelle” où des jeunes “passent de “lycéen brillant” à “étudiant brillant ayant échoué au concours”. Nous sommes en droit de penser que la barrière arbitraire sauterait donc.

Dans un sens, on ne pourrait que s’en réjouir.

Nous l’écrivions dans notre brochure 2022, Cap Catastrophe :

Héritiers du fonctionnement en corporation -l’ordre des médecins est une survivance de Vichy- les médecins sont les grands défenseurs du numerus clausus, qui permet entretenir la rareté de leurs activités, leur garantissant ainsi des revenus considérables, au mépris des patients. Il s’agit d’ailleurs d’une corporation que la grande bourgeoisie soutient, malgré ses hypocrites vœux de libéralisme.

Une libéralisation permettrait à plus de jeunes de devenir médecins, spécialistes, donc de populariser la fonction, et, mécaniquement, de faire baisser les prix, en particulière les honteux dépassement d’honoraires, enveloppes glissées sous la table, coupes-files payants pour ne pas être laissé sur une liste d’attente qui paraît infinie.

Cela serait l’attitude d’un gouvernement authentiquement libéral, celui d’un gouvernement marqué par une idéologie de la concurrence, qui laisserait libre court à la loi du marché.

Seulement, c’est une erreur de croire cela. C’est une erreur de croire que le gouvernement est idéologiquement libéral, que, par doctrine, il s’attaque aux résidus de corporations. Libéralisme et protectionnisme, n’en déplaise aux naïfs qui les croient séparés, ne sont pas des stratégies pour les gouvernements au service de la bourgeoisie, mais bien des tactiques. Parfois, la grande-bourgeoisie s’appuie sur l’un, parfois sur l’autre en fonction des nécessités du temps.

Ce qui caractérise la nature du gouvernement, c’est sa nature de classe, c’est le fait qu’il est au service d’une classe sociale. Son rôle est de correspondre aux désirs de celle-ci. Certes il existe des fractions en concurrence les unes envers les autres, mais dans l’ensemble, aucune n’a d’intérêt dans le fait de liquider cette corporation, de l’amenuiser, de la briser.

Les annonces de façade laissent penser pourtant que c’est bien ce qui se produit, mais les détails trahissent le tableau.

Dans l’abominable Cap 2022, plusieurs éléments font référence aux projets concernant les médecins.

« développer la délégation de compétences aujourd’hui exercées par les médecins (par exemple les métiers d’infirmier en pratique avancée), en s’inspirant des exemples européens et internationaux réussis. Par exemple, certaines vaccinations ou le suivi de patients malades chroniques pourraient être assurés par des infirmiers. »

Chose confirmé par la phrase énigmatique de Macron, prononcée le 18 septembre : « Nous allons créer des assistants médicaux. Ces personnels de santé accompagneront et déchargeront les médecins d’actes médicaux simples. Les premiers arriveront dès 2019 dans les quartiers prioritaires. »

« ces professionnels qui aideront nos médecins dans les prochaines années… 15 à 20% de temps médical pourrait être gagné. 4000 assistants médicaux pourraient être financés dans un premier temps mais ce chiffre pourrait s’accroître si le besoin est là… »

Certains, narquois, se sont exclamés que Macron inventait les infirmiers, mais non. Il s’agit là d’une création d’un corps intermédiaire, qui sera certainement constitué des nombreux candidats et candidates à la faculté de médecine, ceux dont il est dit qu’ils ne doivent pas s’enfermer dans un seul métier. La sélection se fera sous une autre forme.

Ce corps intermédiaire serait un prestataire de service qui s’intercalerait entre les infirmiers et infirmières et les médecins, permettant a ces derniers de continuer de bénéficier d’un train de vie appréciable, tandis que les premiers et premières seraient davantage prolétarisés.

La grande majorité des organisation d’infirmiers et d’infirmières ont dénoncé cette annonce en trompe l’œil, laquelle fait mine de répondre aux besoins de la santé, mais, en vérité, contribue à aggraver la situation.

D’une manière générale, la stratégie gouvernementale visant a assécher les finances de ce secteur et à y faire entrer de plain-pied la question de la rentabilité, il ne saurait y avoir de solution à l’horizon.

Nous ne serions pas hostiles, fondamentalement, à la suppression du numerus clausus si celle-ci n’était pas un miroir aux alouettes. L’existence de ce système illustre parfaitement le caractère pourrissant du capitalisme, qui brise et brime les aspirations populaires à l’entraide, au fait de vouloir se soutenir, au fait de vouloir pratiquer la médecine non par crapulerie, mais bien par un profond désir de solidarité. Ironiquement, Cuba est nettement plus libérale que la France en terme de médecine, ce qui fait qu’elle possède le record de médecins par habitants, cela révèle bien qu’un frein artificiel est mis en place. Nous voyons bien là que même sans l’appât du gain, les salles de classes sont remplies.

Nous sommes favorables à une médecine accessible à tous, à toutes, avec comme stimulant premier dans la recherche l’émulation socialiste. Au lieu de cela, les projets gouvernementaux, les projets de la bourgeoisie tirent en arrière le niveau de vie et l’état de santé.

5 milliards d’économie sont ciblés par Cap 2022. Comment vont-elles se traduire ? Combien de morts ? Combien de mal-soignés ? Combien de suicides au travail ?

Les attaques de Cap 2022 sont là, combattons-les !

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