Opportunisme et élections : les masques tomberont !

Chaque jour qui passe nous rapproche du jour du scrutin de l'élection présidentielle, mais également de celui des législatives. Depuis que le coup d'envoi de la course aux fauteuils a été donné, une chape de plomb s'est abattue sur les luttes. La grande majorité de la vie politique se cristallise autour de ce qui est présenté comme la fonction suprême.

Les élections approchent, et une nervosité s'empare des différentes forces. Que les partis bourgeois s'élancent de toutes leurs forces vers cet objectif, ceci est une chose qui se comprend, qui s'entend. Ils promettent monts et merveilles pour quérir les voix de ceux et celles -une espèce qui se raréfie- qui accordent encore un semblant de crédit à ces discours creux et, avec une intensité croissante, ponctués d'idées et de thèses réactionnaires.

Qu'importe, dans le fond, si leur programme peut-être appliqué ou non, du moment où le bulletin est glissé dans l'urne. II n'existe nullement une chose telle qu'un contrôle sur les élus en régime bourgeois. La propagande politique de ces partis ne s'apparente nullement à l'énonciation d'une vérité, mais bien à la réclame publicitaire, au créneau, au segment de marché, auquel est vendu un produit politique.

Les magiciens ne croient pas à la magie. Le prestidigitateur connaît le secret, le "truc". Les politiciens et politiciennes bourgeois sont de cette même essence, ils et elles sont des illusionnistes. Le Front National sait très bien que ses promesses chocs ne franchiraient jamais la barrière du conseil constitutionnel, pourtant ce parti continue de clamer qu'une fois le pouvoir remis entre leurs mains, celles-ci seront appliquées. La transcription de l'élection de ce parti ne s'est pourtant traduite que par l'arrivée aux affaires d'une clique de politiciens corrompus, clientélistes et putréfiés. Dans l'immédiate actualité, à la suite du "Penelopegate", le Front National, lui aussi ciblé pour ses détournements d'indemnités parlementaires, vient d'annoncer son refus de rembourser les 300 000€ indus. Comble de l'ironie pour le parti dont le slogan fût "tête haute, mains propres."

Les Républicains font de même, en surenchérissant sur le nombre de fonctionnaires supprimés, en tentant de faire une synthèse avec les thèses de l'extrême-droite, en se drapant dans une rigueur inflexible inventée de toute pièce, tant leur corruption est sans borne. Combien de Lagarde, combien de Balkany, combien de Fillon sont nécessaires pour illustrer l'opportunisme et la gloutonnerie sans borne de ces parasites ? L'affaire de l'épouse de François Fillon est illustrative des méthodes et de l'absence intégrale de principe de la part de ces individus. La politique, pour eux, pour elles, n'est qu'un plan de carrière comme un autre, avec ses avantages en nature et ses petits bénéfices pris à la volée.

Après 5 ans d'exercice du pouvoir, le Part Socialiste accouche de deux créatures. La première, Emmanuel Macron, semble tout droit issu d'une expérimentation visant à donner un avatar de chair à la Loi Travail. Il est l'enfant d'une union entre le Parti Socialiste et le MEDEF. Emmanuel Macron poursuit la logique sociale-libérale du Parti Socialiste, l'emmenant jusqu'à sa conclusion finale : elle retire sa peau, son masque social pour se vouer à un libéralisme intégral. Il trouve ses soutiens derrière des businessmen de la politique, tel Gérard Collomb, sénateur-maire de Lyon, confondant régulièrement Chambre du Commerce et de l'Industrie et mairie. Derrière des individus ayant été au PS pour se doter du réseau permettant leur élection, mais donc la couleur politique attribuée est loin d'avoir laissé une empreinte. Le seul mérite de ce candidat est le suivant : à tant être la descente de lit du MEDEF, son programme en devient un des plus applicables, si les urnes lui en donnent l'occasion.

Le deuxième enfant est la chimère tant espérée par le Parti Socialiste, mais également par le PCF. Benoit Hamon, le restaurateur de la dignité. En écartant François Hollande, en refusant Manuel Valls, le PS se redonne une chance. Benoit Hamon est relativement resté peu à l'écart des éclaboussures. Relativement immaculé, s'étant inventé un programme -inapplicable au possible- marqué à gauche, marquant une rupture avec la ligne Hollande – Valls, il ouvre la voie au rapprochement avec les éléments du PCF qui ne sont pas dans les bras de Jean-Luc Mélenchon. Nombre de pétitions, d'appels, exigent une fusion des forces des différents candidats, pour qu'une seule liste de gauche soit présente. Ainsi, le PS, qui a liquidé le code du travail, qui a bombardé, expulsé, matraqué, réprimé, emprisonné, est de nouveau devenu fréquentable. Ces cinq ans sont excusés, grâce à l'irruption du candidat Hamon.

Le programme de Hamon est un exemple même d'illusion, de jeu de lumière, de tour de passe-passe. Il est sensiblement plus à gauche que celui de Hollande en 2012, mais pourtant il ne donne aucune explication de l'échec de ce dernier à le mettre en œuvre. Hollande serait il humainement mauvais ? Fut-il un agent dormant du MEDEF ? Ou cela est il simplement révélateur de la nature du régime bourgeois, lequel est un jeu de dupe, dans lequel l'intérêt de la bourgeoisie primera toujours ? Dans ce cas là, comment le candidat Hamon prétend-il surmonter les écueils ? Les voit-il ? Probable que oui, mais probable également que cela de lui cause guère d'émotion. La mystique du fauteuil Elyséen suffit à motiver et à promettre tout ce qui mobilisera pour les urnes.

A l'exception, dans une certaine mesure, du dernier candidat, lequel joue la carte de "l'aile gauche", aucun ne se prétend être dans le camp du peuple, aucun ne se targue d'être un acteur de la lutte des classes. Ils sont des ennemis de classe, mais des ennemis déclarés, ouverts, assumés. Rendons à César ce qui est à César, rendons leur cet hommage là.

Le propre de la trahison est de venir des siens. C'est de venir de son camp, de sa chair, de ses amis.

Jean-Luc Mélenchon est de ceux dont le parcours parle pour eux. Difficile de donner l'argument de la naïveté pour cet individu qui, comme son fidèle Alexis Corbière, est passé par le Pôle Emploi du trotskisme : l'OCI et ses diverses déclinaisons. Tout comme Lionel Jospin, Jean-Christophe Cambadélis, Henri Emmanuelli, Gérard Filoche et d'autres, "Santerre" comme il se fait appeler, a milité au sein du groupuscule lambertiste avant de faire carrière au Parti Socialiste.

Etant donné la nature des tracts et des documents publiés à l'époque par cette organisation, difficile de pouvoir contester que Mélenchon dispose d'un certain bagage idéologique. Nous ne ferons pas l'offense de le nier.

Pourtant la lecture de "l'ère du peuple", du "hareng de Bismarck" ou encore du programme de la France Insoumise, révèle un contenu schizophrène. Le programme est typiquement celui du trotskisme, dans toute la splendeur illusoire du programme de transition, auquel s'ajoute la saveur typiquement issue de l'OCI, maintenant du POI  : le chauvinisme.

Social, le programme l'est. Il est indéniable de le mentionner. Ce programme fait la part belle aux promesses de conquêtes sociales, de hausse de salaire, de défense de l'emploi et des conditions de travail.
Chauvin, il l'est également. La dictature de l'UE, la vente de la France à Angela Merkel, la terrible occupation des troupes de l'OTAN en France, les arguments classiques passent et repassent, pour se ponctuer d'un magistral -et impérial- slogan: une nouvelle indépendance pour la France. Une place de la France dans le Monde, à travers ses joyaux que sont ses colonies. Une République Une et Indivisible. Qu'importe qu'il faille tenir par la force armée Mayotte, que les Békés s'engraissent dans les Antilles, ou que le FLNKS subisse la répression. Qu'importe encore les Bretons, les Basques, les Corses. "Paris vaut bien une messe" aurait prononcé Henri IV ; la place de la France dans le Monde vaudra bien une Saint-Barthélemy de ceux qui veulent la libération nationale.

Surtout, le programme porte la main du mythe façonné par les réformistes radicaux : la possibilité de s'affranchir de la dictature du capital. La croyance qu'il est possible -tout comme Hamon et sa promesse d'un salaire pour tous- d'imposer des contraintes à la bourgeoisie sans qu'elle ne se rebiffe, sans qu'elle ne se rebelle, sans qu'elle n'appelle à l'écrasement de ceux qui osent -à peine- porter la voix contre elle.

C'est là le paradoxe sot du programme de transition, il tient, bancal, une jambe plus courte que l'autre. Un programme trop ambitieux pour qu'il ne soit réalisé dans le cadre de la démocratie bourgeoise, mais trop court pour être révolutionnaire. Songeons-y : s'il est possible de contraindre la bourgeoisie à accepter l'intégralité du programme de la France Insoumise, du salaire socialisé ou d'autres inventions chargées de conférer un vernis radical au réformisme; pourquoi ne pas simplement la déposséder des moyens de production et de les remettre entre les mains du peuple ?

L'idée sous-jacente serait probablement de démontrer l'incapacité du capitalisme à  satisfaire ces revendications, poussant ainsi les travailleurs, d'eux-mêmes à se diriger vers la révolution. Hélas, trois fois hélas, cet aventurisme ne masque que l'absence de stratégie, que le vide de l'analyse politique et historique. Il n'entraîne que le désespoir chez ceux qui ont placé leur confiance en lui. En niant la dictature de la bourgeoisie, en niant la nécessité de briser son ordre, en escamotant la question de la révolution, le programme réformiste social-chauvin de Jean-Luc Mélenchon s'oppose, de fait, à l'anéantissement du capitalisme.

Au moins a-t-il un mérite, c'est celui de poser la question du pouvoir, même d'une manière erronée, même d'une manière chauvine. Ce n'est même plus le cas de l'autre faction trotskiste, le NPA.

S'exprimer sur le NPA sans tirer sur l'ambulance, est difficile. L'attitude ambivalente de l'organisation sur un grand nombre de sujets, notamment sa capacité à participer, à la fois à des rassemblements de soutiens aux Kurdes qui se battent contre Erdogan et en Syrie et à la fois à d'autres avec ceux qui les égorgent, est illustrative et typique du trotskisme ainsi que de l'amateurisme.

 Dans la lutte pour les élections, panne complète de soutiens, le Nouveau Parti Anticapitaliste semble ne pas être en mesure de se présenter. L'organisation s'est fendue d'une pétition particulièrement pathétique, au sens premier du terme, sur la nécessité, pour la démocratie, que soient présents les candidats de cette organisation.  A courir deux lièvres stratégiques, le verbiage révolutionnaire et le fond réformiste, aucun n'est atteint à la fin. Au lieu de dénoncer la dictature de la bourgeoisie, le NPA l'implore de lui laisser une chance. Au lieu de dénoncer la mascarade électorale, il se met à genou, supplie, pleure pour que lui soit donné la possibilité de participer au jeu truqué

Quant au programme, le NPA confirme sa place de super-syndicat, restant dans l'économisme et la lutte pour les droits démocratiques. Augmentation du SMIC, meilleure égalité salariale…etc. Si le NPA possède un mérite, c'est celui de dénoncer l'impérialisme français. Cela ne l'empêche pourtant pas d'appeler à son intervention dans les conflits, notamment syrien.  

Bien triste tableau du panorama électoral. Cent ans après la révolution d'octobre 1917, les illusions sur la bourgeoisie et son régime durent. Rien d'étonnant en cela de la part des partis électoralistes, mais là où le bât blesse, celles-ci contaminent également ceux et celles qui se placent pourtant en dehors de cette course.

 

De la phrase de gauche à l'unité avec le réformisme.

Nombre d'organisations politiques revendiquées révolutionnaires trébuchent dans les fils tendus entre leurs jambes par la bourgeoisie. La peur motive nombre de prises de position erronées. En premier lieu la peur du FN, entretenue par ceux qui ne se gênent pas pour en appliquer le programme, laquelle donne naissance à cette volonté de faire barrage à ce dernier, quitte à s'allier à l'ennemi de classe. Cette position fait rabattre leur drapeau, les fait se soumettre idéologiquement, stratégiquement, à leur oppresseur.

Le manque de confiance dans la capacité des masses à comprendre la nécessité d'une révolution ; à être en mesure de se saisir des conceptions politiques, à s'impliquer et à rejoindre la lutte contre le capitalisme. Le manque de confiance et sa propre conception.

Ceux qui rejoindront Hamon, sous le prétexte ressassé tant en tant de fois qu'il est "possible de tirer vers la gauche le PS", au lieu de chercher à anéantir notre bourreau de ces 5 dernières années. Prétexte déclinable en maintes et maintes versions, lesquelles permettent de justifier un retournement de dernière minute et un appel au vote.

Les professionnels du "soutien critique" sont légion. Donnant un blanc-seing au bourgeois, tout en restant "critiques", ils et elles ne font qu'accréditer la validité de ce jeu, participent, le renforcent. Leur critique ? Quel impact a-t-elle ? Aucun.

La politique éternelle, centriste, du ni-ni rejaillit également. "Ni vote, ni boycott" ; tout comme auparavant le "ni pour, ni contre" ; "ni guerre, ni paix"… Cette position est une manière de ne pas attaquer le fond de l'affaire, de ne pas prendre position, de tenter de concilier ce qui est antagonique. Cette manière permet de prendre fait et cause pour l'un -ne pas s'opposer signifie accepter- tout en se donnant une image de refus pour conserver sa crédibilité. Son effet est de paralyser, de stopper, d'immobiliser tout mouvement, tout réflexion, tout action. La neutralité n'est pas communiste.

La tâche des communistes, la ligne qu'ils et elles doivent défendre existe pourtant. Nous ne pouvons pas rester sourds aux élections, et nous devons nous positionner : les soutenons nous ? Acceptons-nous ce jeu ? Appelons-nous à voter pour un candidat aux législatives ou aux présidentielle ?

Nous ne jouons pas aux jeux truqués.

Un jeu dans lequel la bourgeoisie pose ses règles, pour faire rentrer ses laquais dans des cadres qu'elle contrôle, pour son propre intérêt et en imposant son ordre du jour. Présenté comme cela, bien fol serait celui ou celle qui accepterait. Et pourtant.

Nous ne faisons pas partie de cette espèce. Nous dénonçons ce jeu ridicule et nous appelons à le dénoncer. Chaque voix donnée au jeu de la bourgeoisie l'accrédite et poursuit l'existence du mensonge. Pierre Desproges écrivait "l'adulte ne croit pas au Père Noël, il vote." Cette phrase illustre intégralement la nature de la démocratie bourgeoise. Une farce. Un trompe l'œil. La bourgeoisie elle-même en brise régulièrement les règles, lorsqu'elles la contraignent trop.

Voter pour ces candidats qui plient l'échine sous ces règles, pour des partis réformistes, nous ne le reprochons pas aux individus. Nous ne les blâmons pas, nous blâmons notre faiblesse à faire vivre le camp du peuple comme un contre-pouvoir réel.

Mais les organisations qui appellent à jouer ce jeu, ou qui ne le dénoncent pas, doivent assumer la responsabilité de leurs actes et de leurs choix. Si un parti révolutionnaire, tactiquement, présentait des candidats, la question se poserait peut-être de manière différente. Les élections seraient une tribune tactique, un point d'attaque comme un autre et non le point suprême.

Nous appelons au boycott des élections. Nous appelons à refuser ce jeu, à refuser chaque aspect de ce jeu et à dénoncer chacune des manœuvres des opportunistes, qu'elles fussent pour rabattre les électeurs vers la bourgeoisie ou pour couvrir leurs traces.

Nous appelons aux réunions qui visent à constituer un camp antiparlementaire et anti-électoral. Nous appelons à la constitution d'un front, d'une alliance refusant le parlementarisme et la démocratie bourgeoise. Nous appelons à une expression politique commune, sur les bases de l'anticapitalisme, de l'opposition -en premier lieu- à l'impérialisme français, sur la dénonciation de la parodie de démocratie et le rideau de fumée des élections.

Nous appelons à constituer ce camp du peuple, seul à même de pouvoir exister et peser, à l'heure actuelle, comme une force antibourgeoise. Nous appelons à l'existence d'une opposition au pouvoir de la bourgeoisie, non pas dans les salons et les fauteuils, mais dans la rue, dans les usines, dans les champs, les écoles, les universités, les pôles emploi et les prisons.

2017 ne doit pas être une année sous le signe de la bourgeoisie, elle doit être l'année de la renaissance, dans l'Etat Français, d'un camp populaire, indépendant et offensif !

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